vendredi 22 mai 2009

Interview de Rémi Van Peteghem



Pour une exploration gastronomique de la biere


En France, quand on parle gastronomie, on pense plutôt au vin ?

Tradition oblige… C’est un fait que le vin tient le haut du pavé, sur toutes les tables et en particulier dans les restaurants gastronomiques. Pour l’essentiel, la bière est réservée à l’apéritif. Pour le reste du repas, le vin est roi. Même et peut-être surtout pour les étrangers de passage à Paris qui chez eux boivent de la bière à table, mais qui, en France, pensent que le vin est plus « typique ».

Dans un restaurant très contemporain comme le SENSING, vous percevez des changements d’habitudes ?

Oui, dans la mesure où nos clients sont plus curieux, à la recherche de sensations nouvelles. Ils ont moins de tabous et sont souvent prêts à se laisser guider vers des plats ambitieux et surprenants. Mais sur ce point, la balle est dans le camp des chefs et des sommeliers… Spontanément, un client ne va que très rarement prendre l’initiative de commander une bière pour expérimenter de nouveaux accords.

Vous êtes en quelque une nouvelle « force de proposition » ?

En tout cas, je cherche à sortir des sentiers battus. La bière est un bon exemple, car si on en boit peu à table, ce n’est pas parce qu’elle se marie plus difficilement que le vin avec les plats que l’on propose. C’est surtout parce que la majorité des sommeliers français, même excellents, ne sont pas formés à conseiller les clients dans le choix des bières. C’est aussi parce que la demande étant faible, on ne peut pas se permettre de disposer d’une cave adaptée qui exigerait pour bien faire au moins une quarantaine de bières différentes. C’est un cercle vicieux…

On peut boire de la bière avec tous les plats ?

C’est une question d’accord, exactement comme pour le vin. On ne peut pas boire une Guiness sur un poisson cuit lentement à la vapeur. Elle casserait son goût simple et subtile. En revanche, on peut expérimenter des bières mêmes fortes, avec des plats adaptés, par exemple avec une poule faisanne. En ce moment, je propose justement des plats en suggérant de les boire avec une bière plutôt qu’avec du vin. C’est un moyen d’aller à l’encontre des idées reçues, aussi simplistes que les associations du type choucroute/bière, poisson/vin blanc, gibier/vin rouge.

Et la bière dans la cuisine ?

La bière est un ingrédient véritable. Dès qu’elle chauffe, elle perd son pétillant et qu’on l’identifie ou pas, le goût de la bière est très apprécié pour sa légère amertume et ses saveurs très parfumées. Elle permet notamment de rehausser plats, garnitures et sauces. À cet égard, j’ai la chance d’avoir un second d’origine autrichienne, Stephan Zuber, qui connaît la bière et sait la faire apprécier. De ce côté-là aussi, il m’aide à proposer une cuisine en décalage avec les habitudes française, pour surprendre sans déranger.




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